mercredi 10 février 2016

De la gestion des affaires consulaires à l’action diplomatique

L’annonce à Dakhla, un des chefs-lieux du Sahara marocain, de la nomination de 78 ambassadeurs, est un événement dont l’ampleur est sans pareil, dans les annales de notre ministère des affaires étrangères. 
La symbolique du lieu de cette notification est très forte. 
Tout connaisseur de la stratégie, peut constater qu’il y a, en filigrane, une analyse, une volonté politique, un concept et des objectifs. Un effort plus que louable, mais est-il suffisant ? 
Il est illusoire de penser qu’en changeant seulement les hommes nous arriverons au but escompté.
S’agissant des personnes désignés, lors de la visite royale au sud du royaume (février 2016), pour différents postes de responsabilités, les journalistes, les journaleux, les analystes, les réseaux sociaux…ont émis des avis plus ou moins objectifs, encensant certains et diffamant d'autres. Ainsi, par exemple, les mérites incontestables de deux grands commis de l’état, l’ancien directeur de la RAM et l’ancien l’ambassadeur du Maroc en Italie, ont été vantés. Par contre le nouveau directeur de notre compagnie aérienne nationale, a été taillé en pièces, en le qualifiant de petit calibre et pas à la hauteur de la tâche. Il a été même question  de népotisme, dans sa désignation. Il n’était pas, d’ailleurs le seul. En effet, des médias réels et virtuels ont relevés qu'une telle est la sœur d'un tel responsable et qu'un tel nominé est le fils ou le parent d’une telle personnalité connue.
C’est surprenant, pendant des mois, des ambassades marocaines, dans des contrées très sensibles, étaient sans ambassadeurs et tout le monde, y compris les observateurs, s’accommodait de la situation « pas de vagues SVP ». C’est seulement, après le fâcheux épisode de la Suède, que l’opinion publique, s’est rendue compte du vide diplomatique que nous avions en Scandinavie.
Il ne faut pas se leurrer, quelle que soit l’objectivité entourant le choix de ces diplomates, il y a une marge d’erreur que les responsables du monde entier assument en toute conscience. On n’est pas dans les sciences exactes. Le plus important est d’atteindre les objectifs globaux au moindre coût. Il n’est pas interdit de corriger par la suite les imperfections de la démarche. « La perfection n’est pas de ce monde ».
Le marchand de légumes, se lève tôt pour aller à la criée acheter des légumes, dans le but de faire un bénéfice conséquent. Il fait de son mieux pour choisir, en fonction de ses moyens et de la marchandise disponible, la meilleure qualité possible, sachant qu’avec toute son expertise et toute sa volonté, il y aura 10% de son acquisition, qui sera probablement pas de très bonne qualité voir même invendable. C’est un risque assumé et intégré dans ses calculs. L’essentiel pour ce commerçant, qu’en fin de journée, il aura réalisé son objectif global. 
Loin de moi de comparer nos valeureux cadres à des légumes (même s’il existe la formule consacrée « de grosses légumes ») la métaphore est à titre pédagogique seulement.
On est un peuple bizarre, dès qu’il y a un changement ou tentative de changement on fait tout pour freiner, dénigrer... l’initiative. On préfère se contenter du statu quo et de l’immobilisme au détriment du progrès.
Le choix judicieux des hommes fait partie intégrante d’une stratégie diplomatique ou toute autre stratégie. Par souci d’efficacité et d’efficience, toute stratégie, qu’il s’agisse d’une stratégie nationale ou sectorielle, avant l’action, doit répondre, méthodiquement et avec précision aux questions suivantes :
1.    Où sommes-nous ?
2.    Où voulons-nous aller ?
3.    Quels sont nos moyens et nos facteurs de puissance ?
4.    Comment allons-nous arriver à notre but ?
S’agissant de la stratégie diplomatique, si nous n’avons pas une structure englobant des cellules de veille ad hoc, nous aurons une lecture tronquée de notre environnement et de nos facteurs de puissance.
La volonté politique, quant à elle, nous permettra de fixer les objectifs et d’allouer les moyens en conséquence. vouloir atteindre le but escompté, nous demandera la conception d’idées fortes, basées sur des études établies par des équipes de spécialistes inspirées et rompues à cet exercice.
Si nous bridons l’esprit d’initiative chez les exécutants et si nous pratiquons du micro-management, alors tout le travail fait en amont, nous ne servira à rien et l’action de nos ambassadeurs sera réduite à la gestion des affaires consulaires au lieu de remplir une mission diplomatique, dans les règles de l’art, au service des intérêts suprêmes du Maroc.
 

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