“…the
essence of war is convincing the enemy to accept our position[i]…”
John A. Warden III
A l’annonce par
les média de l’action terroriste qui a endeuillé le Canada, le 22 octobre 2014,
je me suis rappelé que la veille, j’étais devant les locaux de notre parlement
à Rabat. Alors je me suis demandé si les locaux de nos institutions et de nos
fleurons économiques sont suffisamment protégés. Et au-delà de ces
vulnérabilités physiques, qu’on est-il des vulnérabilités Morales, Idéologiques,
Sécuritaires et Médiatiques du pays face au terrorisme ?
Et par la suite, sur ce même tragique événement, l’information suivante était
publiée : «Des édifices du
centre-ville d'Ottawa, incluant le parlement, ont également été barricadés
jusqu'à 20h30, mercredi soir, puisque les forces policières craignaient
toujours qu'un individu armé rôde dans le secteur[ii]».
L’action d’un séide isolé a paralysé tout un pan du Canada au niveau
stratégique.
Cette paralysie
stratégique rappelle la théorie en la matière de John Warden, un ancien colonel
américain, le concepteur de la campagne aérienne durant la guerre du golfe (Desert
Storm). Cette théorie cerne les vulnérabilités
à attaquer pour ne laisser aucune chance à l’ennemi de gagner.
En outre, les terroristes se caractérisent par la :
- Fugacité de l’action, en sortant de nulle part et en s’échappant facilement ;
- Puissance de feu, en concentrant des armes adaptées à l’objectif désigné ;
- Souplesse d’emploi, en agissant en tout lieu et en tout moment avec des moyens adéquats ;
- Rapidité, en exécutant leurs méfaits en un temps très court ;
- Maîtrise de l’information, en exploitant les médias et les réseaux sociaux ;
- Maîtrise du Milieu, en ayant une bonne connaissance du milieu de l’opération.
Ces caractéristiques définissent aussi les actions d’une armée aérienne.
De surcroit, à l’instar des forces
aériennes, ils assurent une :
- Projection de puissance, sans troupe au sol, juste de l’armement de supériorité. Pour l’attaque d’Ottawa, en l’occurrence, un homme endoctriné applique une puissance paralysante, amplifiée par la panique et les média ;
- Projection de forces sur le terrain, avec des moyens de combat, de commandement et de soutien. Daesh a occupé Mossoul, une ville iraquienne, en projetant ses propres forces.
Le terrorisme est un ennemi fugace, pour le vaincre ou tout au moins le
contenir, une autre conception est à mettre en place et à renforcer.
Compte tenu de la similarité de ses caractéristiques avec celles des forces
aériennes et afin de se prémunir de ses menaces, controns-le, avec le même
concept de défense utilisé pour se protéger des attaques aériennes à savoir :
- Défense préventive : empêcher l’initialisation des attaques ;
- Défense active : intercepter les terroristes avant qu’ils commettent leurs forfaits ;
- Défense passive : rendre les attaques moins efficaces.
Toutefois, l’obtention d’une réaction adaptée à la situation, sans sombrer
dans les paniques ou les paranoïas alimentées par l’instantanéité de l’information
diffusée par les médias, exige une structure d’alerte et de commandement
centralisée.
Le présent
article traitera des différents modes de défense contre des forces sectaires et
déstabilisantes, sans pour autant prétendre constituer un recueil de recettes
de lutte contre ce phénomène. Il aura le mérite de susciter la réflexion sur un
sujet vaste et en perpétuel changement. Et comme disait Antoine de
Saint-Exupéry :
"Si tu veux construire un bateau, ne rassemble pas tes hommes et
femmes pour leur donner des ordres, pour expliquer chaque détail, pour leur
dire où trouver chaque chose... Si tu veux construire un bateau, fais naître
dans le cœur de tes hommes et femmes le désir de la mer.[iii]"
Défense préventive
C’est une phase
très dure et parfois abstraite pour le commun des mortels, car ses résultats ne
sont pas perceptibles immédiatement. Les efforts consentis peuvent décourager
les décideurs impatients et en quête de coups d’éclats médiatiques pouvant
redorer leurs blasons auprès de l’opinion publique. On ne récolte pas les
dividendes tout de suite, c’est une anticipation stratégique, c’est un
travail de fond qui demande de la patience, de l’audace et des convictions
affirmées.
Tout le long de
cet article des termes guerriers seront utilisés sciemment pour mieux montrer
que c’est une guerre qui doit être menée et non des joutes verbales avec des
termes creux qu’il faut organiser.
Vulnérabilités Idéologiques
"Il ne faut jamais laisser en friche les facultés de la nature."
Gustave Flaubert[iv]
Non à une société aseptisée, le pays doit garder son cachet tel qu’il est
décrit dans sa constitution :
“… le Royaume du
Maroc entend préserver, dans sa plénitude et sa diversité, son identité
nationale une et indivisible. Son unité, forgée par la convergence de ses
composantes arabo-islamique, amazighe et saharo-hassanie, s’est nourrie et
enrichie de ses affluents africain, andalou, hébraïque et méditerranéen.
… l’attachement
du peuple marocain aux valeurs d’ouverture, de modération, de tolérance et de
dialogue pour la compréhension mutuelle entre toutes les cultures et les
civilisations du monde[v] »
Néanmoins, une autre conception pour anticiper le développement de suppôts
du fanatisme religieux ou autre, est nécessaire, ne laissant aucune place à
l’action des idéologues sectaires. En particulier dans les domaines du
spirituel, de l’éducatif et du loisir.
Le domaine spirituel
Le Maroc a la chance d’avoir un commandeur des croyants, qui de par sa
légitimité permet au pays de garder un équilibre dans ce domaine. Cependant au
quotidien, malgré les efforts louables du Ministère des Habous et des affaires
islamiques, l’encadrement de cet espace est loin d’être parfait. C’est cet
encadrement qui va permettre d’armer la population en générale et la jeunesse
en particulier, contre les idéologies de l’intolérance.
Le guide de
l’imam, du sermonnaire (al-khatîb) et du prédicateur (al-wâ‘îz), publié par le
ministère des Habous est un garde-fou d’une importance capitale, il
stipule :
« Le prône
du vendredi, parce qu’il se donne comme but de purifier les âmes, d’inculquer
une éducation morale et de préciser des concepts religieux fondamentaux, est-il
un moyen efficace pour une telle fin. Mais il peut tout aussi bien se révéler
subversif lorsque le sermonnaire n’a aucune intelligence (fiqh) ni des règles
ni de la sagesse propre du discours canonico-religieux[vi]».
Sur le terrain, les discours doivent être construits dans leurs formes,
élaborés dans leurs messages, audibles dans leurs présentations orales. En
effet, les thématiques abordées ne doivent pas être aléatoires mais
circonstanciés. Quand le pays organise une campagne de lutte contre les
accidents de la circulation, l’imam dans son prône doit accompagner le
mouvement par un discours canonico-religieux,
vivant et dans un style contemporain et compréhensible par la majorité de son
audience, sans pour autant se transformer en une propagande pour tel ou tel
sujet. Le sermon ne doit être ni un exposé encyclopédique de citations
soporifiques ni un exercice de style compliqué et sans but. Mais plutôt, un
prêche construit autour d’un message simple et facile à retenir.
Les précepteurs des idéologies radicales, les gourous des sectes, les
leadeurs de toutes les idiologies se distinguent par des messages précis,
concis et clairs et une « prestations oratoire » de haut vol.
Une formation continue et un contrôle périodique de tous les intervenants
dans les champs religieux sont des moyens appréciables « d’instruire par
acte de piété » la population et la rendre apte à vivre sa spiritualité en
conformité avec les règles sociales de la nation.
On ne confie pas sa santé à un charlatan, ni sa voiture à un bricoleur et
pourquoi devons-nous se contenter de n’importe qui pour nous expliquer les
thèses et les préceptes de notre religion ?
Il faut prendre le taureau par les cornes, affronter le problème de face.
Il est illusoire de penser réduire nos vulnérabilités par une stratégie
indirecte, en combattant les islamistes radicaux par le satanisme, le soufisme
ou toute autre déclinaison religieuse ou idéologique. C’est des solutions de
facilité et à court terme. Cette manière d’agir, au lieu de résoudre un
problème, aura créé un autre antagonisme plus coriace à combattre dans le
futur, car ses adeptes auront connu nos modes d’action et nos centres de
gravité.
Les centres de gravité de ces sectaires, sont le message délivré et la
personne qui le délivre. C’est ceux-là qu’il faut viser. Il faut investir
et contrôler les mosquées, les réunions religieuses, les établissements
scolaires… aucun espace d’expression dans le domaine religieux ne doit être
laissé libre à des énergumènes qui véhiculent la haine et l’intolérance.
Le domaine éducatif
Les parents et les établissements scolaires sont les socles de base de
l’éducation de la jeunesse. Alors qu’une fois adulte, la formation continue,
les mosquées, les média, les lieux de travail et de loisir… constituent un
complément d’éducation appréciable pour construire l’homme.
Les institutions
éducatives instruisent des compétences afin de donner à chaque individu
la possibilité de remonter l’échelle sociale. Elles éduquent aussi culturellement
afin de permettre à chaque individu de vivre en bonne intelligence avec les codes
de la société.
S’agissant de l’instruction des compétences notre système (quoi qu’on dise)
se défend, pour preuve la réussite de nos étudiants à l’étranger. Mais le
problème réside dans l’éducation culturelle.
Former l’esprit d’une personne, c’est lui transmettre le savoir d’acquérir
le discernement permettant d’évaluer correctement les idées et les concepts qui
circulent dans la société et lui donner une ouverture sur l’autre par l’art,
l’histoire, le sport…
Les institutions éducatives sont un terreau fertile et un milieu propice à la
propagation des idées sectaires par de la manipulation mentale. Ce mental est
le centre de gravité à immuniser par une éducation culturelle de qualité, contre
les dérives de la domination de
la pensée unique et à l’aider à être tolérant aux autres personnes, idées...
La philosophie et l’éducation islamique sont des matières, au lieu de
penser les supprimer du programme à enseigner, il serait plutôt judicieux de
les rendre des outils de développement de l’esprit critique et surtout un moyen
de renforcer les capacités de discernement des étudiants. Il suffit d’adapter
les objectifs de ces cours et de former le corps enseignant en conséquence.
En outre, utiliser les cours de géographie, d’histoire et des disciples
artistiques (musique, peinture, danse, cinéma, théâtre…) comme leviers pour
donner aux élèves et aux étudiants une ouverture d’esprit d’accepter la
différence dans les idées, les races, les cultures…
Par ailleurs, les cours d’éducation civique, les professeurs, les
répétiteurs, les surveillants généraux, les censeurs et les directeurs
d’établissement doivent être utilisés de manière à renforcer le civisme parmi
la population scolaire et estudiantine. Ignorer cette matière et dénigrer les
encadrants, en agissant de la sorte, c’est laisser la jeunesse sans repères. Cette
matière enseignée devra servir à clarifier les règles de jeu de la société et
les encadrants devront jouer leur rôle éducatif de parrainage et d’écoute pour
chaque élève. Cette proximité et cette écoute ouvrent les canaux de
communication, pour arrêter toute propagation virale de rumeurs et rendre les
établissements éducatifs des espaces de liberté et de savoir et non des espaces de non droit et
d’obscurantisme.
Tout manquement dans le domaine éducatif, se traduira plus tard par le
non-respect des codes de la société à travers l’incivisme, le hooliganisme,
l’impolitesse…L’école primaire, le collège, le lycée et l’université n’ont pas
uniquement pour mission de donner des compétences, mais ils ont en priorité, le
devoir d’éduquer avant tout.
Il est nécessaire
d’occuper l’espace éducatif par un encadrement dévoué et un cursus de formation
adapté sans pour autant oublier les loisirs.
Le domaine loisir
Voilà un domaine qui a été délaissé par les gouvernements successifs. Une
petite lueur d’espoir ces derniers temps, des espaces socio-éducatifs sont
réalisés et des projets de théâtres voient le jour. C’est un bon début mais
malheureusement si vous passer par la route côtière de Rabat, dès que vous
sortez du tunnel de l’Oudaya vers Elharhoura, vous aller y trouver des terrains
de sport vides ou bien quelques enfants y jouent seuls, livrés à eux-mêmes.
Ces infrastructures, qui ont coutés chers au pays, à priori, ne rentrent
pas dans une stratégie claire avec des objectifs et surtout des encadrants
pouvant transformer l’énergie de la jeunesse en opportunités de développement
social et éducatif. Le troisième temps de la jeunesse peut être utilisé, par
des esprits malveillants comme un véritable brûlot contre les règles, les us et
coutumes de notre société, en y injectant les semences d’idées radicales
salafistes, sataniques...nous ne devons pas laisser ce terrain en friche. Et
nous devons prendre conscience des nouvelles réalités de notre société, exigeant
que les visions de l’état et du monde associatif puissent être complémentaires
dans l’occupation de cet espace.
Dans les années soixante, le sport scolaire avait une grande importance
dans le cursus de formation des marocains. Les rencontres de football entre les
établissements scolaires étaient organisées, les après-midi du mercredi. Un
jour, suite à une bagarre entre les joueurs, au lieu de voir la racine du mal,
on a opté pour la solution de facilité et ces rencontres ont été purement et
simplement bannies. Pour jouer au foot les élèves devaient chercher ailleurs.
En écartant cette discipline des lycées, le sport dans sa globalité a en pâti
et des courants radicaux se sont développés.
Au summum du communisme, l’Espagne de Franco, avait fait une bonne lecture
de ses réalités et avait investi dans le sport et l’art. Non seulement la route
a été barrée au marxisme, au léninisme… mais, aujourd’hui ces disciplines sont
devenues pour le pays, en plus, des facteurs de développement humain et économique non négligeables.
Vulnérabilités Morales
Ces vulnérabilités et quelques voies et moyens pour y remédier à travers
les valeurs morales et la justice sociale, font l’objet de
deux articles (dont sont extraites les citations reproduites ci-après), publiés sur
sekiat.blogspot.com :
- Daesh : valeurs morales et jeunesse désorientée ;
- Pouvoirs et responsabilités, face au partage équitable des richesses.
« L’injustice, le matérialisme, la corruption, l’arrivisme, la lutte
pour le pouvoir…ont prévalus plus, sur toute autre bonne référence normative de
la société. De ce fait, la jeunesse s’est retrouvée partagée entre ses nouveaux
idéaux et une réalité sur le terrain. Cette réalité, au quotidien et dans tous
les pans de la société et dans toutes les arcanes du pouvoir, est en
contradiction avec les valeurs morales dont tout citoyen pouvait en rêvait. A
cet égard, et avec le temps, de fortes déceptions des dirigeants, du jeu
politique convenu et des règles régissant la société, se sont installées.
… C’est cette déception qui les pousse à sortir du cadre normal de vie et
embrasser les thèses de mouvements idéologiques ou extrémistes, comme Daesh.
En effet, dès son jeune âge, l’enfant est endoctriné, par les parents et
l’école. Puis à l’âge adulte, les hommes le sont par les partis politiques et
les leaders d’opinion… »
Malheureusement, les convictions affichées par les femmes et les hommes considérés
comme modèles sont loin de leurs actes dans la vie de tous les jours.
« Le hiatus entre ce qui est enseigné ou prêché et la réalité vécue,
crée de la frustration chez les jeunes et progressivement, ils se déconnectent
d’une société pleine de contradictions. S’ils n’ont pas eu la chance d’avoir le
parrainage adéquat et le discernement nécessaire pour s’intégrer dans la société, ils se réfugient
donc dans la musique, la drogue, le sport, les jeux vidéo, la religion…un
exutoire à leurs frustrations.
Ainsi, ils deviennent des proies faciles et peuvent tomber aisément, sous
l’emprise des sectes, des mafias, des gourous du mysticisme, des mouvements
extrémistes… Nous ne leurrons pas, seul le respect de l’éthique et des
valeurs morales dans la conduite de la chose publique ou privée, représente un
rempart solide contre la plupart des malaises affectant nos jeunes et peut leur
redonner le goût du vivre ensemble. Le respect de ces valeurs va leur donner
des repères, à travers des exemples de femmes et d’hommes, à suivre et partant,
trouver une place dans la société qui correspond à leurs idéaux».
Dans le but de prévenir ces dérives qui nous rendent vulnérables
moralement, nous devons résoudre les
contradictions de notre société.
Vulnérabilités Sécuritaires
Sans limiter, ni entraver la liberté garantie par la constitution, les
organismes sécuritaires de l’état et les autorités administratives ne doivent laisser
aucune place à l’action de l’ennemi. Tout espace est un espace de liberté et
non un espace de non droit.
La défense préventive est de veiller à l’application stricte du droit. Et
mettre en place des capteurs fiables pour détecter toute tendance intolérante.
Assécher les sources de financement du terrorisme par la lutte contre le commerce
informel, le banditisme, le trafic de drogue, la contre bande…
Mettre en place en mode veille (24/7) des sonnettes, pour le recueil du renseignement au niveau des organismes
sécuritaires et des autorités administratives. Il est même utile d’éduquer la
population dans ce sens, pour la mettre aussi à contribution.
Vulnérabilités Médiatiques
Le 27 /10/14, lors de la réunion de la coalition contre Daesh « Les
Etats-Unis ont appelé ce matin leurs alliés combattant le groupe Etat islamique
(EI) au sein de la coalition à étendre la lutte contre les djihadistes sur
internet, lors d'une réunion à Koweït sur les moyens de contrer la propagande
djihadiste diffusée via les réseaux sociaux.
Le coordinateur américain de la coalition internationale, le général à la
retraite John Allen, a qualifié, à l'ouverture de la réunion, cette propagande
de "guerre horrible ... destinée à recruter et à pervertir des
innocents". Il a estimé que l'EI ne serait "véritablement vaincu
qu'une fois que la légitimité de son message aux jeunes vulnérables sera
niée"[vii] ».
Une stratégie d’information
et de communication (offensive et défensive), basée sur le concept Information
Operations (IO), est nécessaire pour occuper l’espace médiatique. Dans ce
domaine en particulier, la nature a horreur du vide.
Cette stratégie est orientée vers le traitement de l’information subversive
tout en facilitant notre communication.
C’est une guerre psychologique qu’il faut mener en amont pour
prévenir toute dérive sectaire aux fins de :
- Raffermir la cohésion de la nation ;
- Conserver la crédibilité de nos dirigeants ;
- Légitimer l’exécution de notre politique ;
- Garder la liberté de manœuvre de notre gouvernement ;
- Propager les valeurs de notre pays.
Ce concept, va
nous permettre de véhiculer, par le biais des réseaux sociaux ou des média classiques,
une information ciblée pour influencer le public dans le sens voulu et surtout de
contrer la propagande dans sa phase dite souterraine. Sachant qu’à cette étape
est créé le cadre des autres phases de la propagande, à savoir les phases blanches,
grises et noires.
Nous ne voilons
pas la face, c’est une guerre dans le domaine de l’image, de interception
électromagnétique, du numérique médiatique et du cybernétique qu’il faut mener.
Défense active
A cette étape, on est plus uniquement dans la collecte et l’analyse de
l’information. On est en mode -surveillance et interception. Dès que des faits
concluants sont déduits de l'analyse du renseignement et confirmés par la
surveillance, on procède à l’interception des éléments subversifs avant qu’ils commettent
leurs forfaits.
Vulnérabilités Sécuritaires
On ne peut qu’être fière de nos organismes de sécurité dans ce domaine,
mais l’effort est perfectible.
Malgré cela, vu que l’ennemi peut agir en tout lieu et en tout moment avec
des moyens adéquats, peut nous causer des dommages en un temps très court et
peut exploiter habilement toutes les opportunités offertes par le champ de son
action. Il est primordial que la sphère sécuritaire soit en mesure de :
·
Lutter contre la lenteur
administrative
·
Avoir une boucle
décisionnelle réactive et la plus courte possible
·
Assurer une formation de
qualité et en continue dans le domaine du renseignement ;
·
Disposer de moyens de renseignement,
de surveillance et d’intervention adéquats et à la pointe de la technologie.
Vulnérabilités Morales
Si dans la phase de défense préventive, on a agi à long terme et sur des
faits hypothétiques, dans cette phase, on agit sur des faits avérés, pouvant rendre
le moral des marocains moins vulnérables aux thèses sectaires.
Sans trop m’étaler sur cette rubrique, je cite un exemple de facteurs qui
sapent le moral et qui peuvent être exploités par l’ennemi.
Les rapports de la cour des comptes ou des inspections internes ou externes
sont publiés et très peu de suites sont données à ces rapports. Ne pas rendre
les détenteurs de pouvoirs responsables de leurs actes constitue une
vulnérabilité de taille, qui est exploitée par les idéologues des mouvements
radicaux pour attaquer le moral des personnes fragiles.
Vulnérabilités Idéologiques
"Remporter cent
victoires en cent combats n’est pas ce qu’il y a de mieux, soumettre l’ennemi
sans combat est ce qu’il y a de mieux[viii]".
Sun Tzu
Des idéologies sectaires sont déjà là, il est nul besoin de justifier notre
action. Agissons d’une manière proactive et légale pour défendre notre identité.
L’ennemi a attaqué notre identité, il l’attaque chaque jour et il attaquera
sans cesse encore dans le futur.
Nous nous sommes habitués à se sentir en sécurité, sous l’égide de notre
identité symbolisée par notre devise « Dieu- Patrie- Roi ». L’ennemi essaye
par des voies et moyens insidieux de rompre l’équilibre de notre nation, en ébranlant
le principe de tolérance de notre foi, en annihilant la cohésion de notre pays
et en nous faisant douter de nos institutions.
Je laisse le soin aux spécialistes de dérouler toutes les méthodes
d’analyses pour trouver les failles qui fragilisent notre identité et y
remédier.
Vulnérabilités Médiatiques
Si les sécuritaires cherchent à localiser la source des messages subversifs reçus, c’est son
contenu qui constitue la vraie menace pour les cellules de communication, si
elles existent.
Nous sommes ciblés dans tous les moyens d’informations et de communication.
Il est temps que nos média allument des contre-feux pour arrêter la propagation
des idées intolérantes. Il est Il est primordial d’empêcher nos contradicteurs
de profiter de la liberté permise par notre espace médiatique. Et c’est moins
onéreux et plus efficace que de s’attaquer physiquement aux initiateurs du
message, surtout s’ils sont loin. A cet effet, opérer d’une manière
structurelle, une contre-offensive virulente, étudiée, en harmonie avec la
stratégie nationale et généralisée dans tous les média et réseaux sociaux, est
essentielle. L’offensive est la meilleure défense dans ce domaine.
Défense passive
La routine et l'illusion de se sentir en sécurité comme pour le passé, sans
doute, brouillent le jugement et finissent quasi inexorablement par nous
persuader d’être invulnérable. C’est pourquoi la défense passive du pays doit
être le souci premier de tout à un chacun. Si nous sommes à cette phase de
lutte, soit que nous ne avons pas de bouclier de défense, soit qu’il est
défaillant.
Néanmoins, le risque zéro n’existe pas, quel que soit la qualité du système
de défense d’un pays, il
n’est pas impossible qu’il soit victime d’une attaque terroriste,.
L’objectif de la défense passive est de sauver des vies et de réduire au
minimum les effets de ces attaques.
S’agissant des vulnérabilités sécuritaires, je pense, que les attentats de
l’hôtel Atlas Asni, de Casablanca et du café Argana, étaient des alertes sérieuses
ayant poussées les cénacles sécuritaires marocains à chercher à avoir une
défense passive efficiente.
Dans le domaine médiatique et cybernétique on est loin d’être au niveau
requis pour se défendre contre un ennemi de plus en plus virulent et qui
exploite toutes nos vulnérabilités. En effet, l’ennemi qu’il soit terroriste ou
non cherche à déstabiliser et à paralyser nos institutions. La diffusion sur
twitter des correspondances de nos affaires étrangères a certainement rendu
difficile le travail de nos diplomates.
Le durcissement de nos systèmes informatiques, du moral de nos citoyens et
de nos infrastructures critiques pour le fonctionnement normal de notre économie
et de nos institutions est un devoir vital et même existentiel.
Vulnérabilités physiques
“Creativity is inventing, experimenting,
growing, taking risks, breaking rules, making mistakes and having fun”
Mary Lou Cook
Les questions que
nous tous, nous devons se poser, quelle que soit notre implication dans la
défense de notre pays, sont : nos infrastructures sont-elles
protégées ? Et même s’elles le sont ; quels sont leurs degrés
de protection et contre quelles menaces ?
Pour répondre à
ces questions nous devons prendre en compte que les assaillants, à l’instar des
forces aériennes, vont sélectionner des cibles, les documenter et les valider. Les
cibles seront priorisées et les informations sur chaque cible seront réunies. Les
cibles sont validées en répondant aux questions suivantes :
- La cible est-elle conforme à leurs objectifs et à leurs directives ?
- La cible contribue-elle à nos activités et à notre volonté de les combattre ?
- La cible est-elle opérationnelle ?
- La cible est-elle importante ?
- La cible est-elle sensible politiquement ?
- Quel serait l’impact psychologique sur nous en cas de traitement de la cible ?
- Quelles sont les considérations légales ?
C’est ce
processus qui va aboutir au choix des moyens et des modes d’action des
terroristes.
Sans vouloir trop
m’étaler sur ce sujet et surtout sans demander à quiconque de réinventer la
roue, je ne doute pas de la créativité des responsables intéressés par ce sujet,
qui en se référant aux expériences américaines et françaises en la matière, seront
trouver les parades idoines à toutes les attaques terroristes.
Ces expériences font
l’objet des documents suivants :
- Presidential decision directive/nsc-63 May 22, 1998;
- The 9/11commission report, Final Report of the National Commission on Terrorist Attacks upon the United States;
- Instruction générale interministérielle relative à la sécurité des activités d’importance vitale N° 6600/SGDN/PSE/PPS du 26 septembre 2008.
C’est dans cette
phase, plus que dans les autres phases, qu’une structure proactivité est demandée,
car elle établira des procédures prévoyant toutes les éventualités
envisageables et possibles. De ce fait, le nombre de failles sera réduit et la
réaction sera plus rapide, permettant ainsi d’atténuer amplement les effets des
attaques.
Structure de commandement
Une structure de
commandement performante et réactive est la clé de voute de tout dispositif de
sécurité qui se respecte.
Le ministre de la
Communication, Porte-parole du gouvernement du Maroc a indiqué, le mercredi 29/10/2014
« que la politique sécuritaire du Maroc est marquée par l'efficacité, la
prévention et l'adaptation continue à l'évolution du phénomène terroriste, afin
de faire face à ses dangers à leur genèse ».
En outre, selon
l’agence marocaine de presse (MAP-25/10/2014), il s’est tenu, à l’aéroport Mohammed V, une réunion
« consacrée à l'examen des mesures de sécurité déployées au niveau de
cette plateforme aéroportuaire et des autres aéroports du Royaume ». Et le
ministre de l’intérieur a annoncé à cette occasion que : « il sera
procédé à la mise en œuvre d'un nouveau dispositif de sécurité, baptisé
"Hadar", intégrant les Forces Armées Royales, la Gendarmerie Royale,
la Police et les Forces Auxiliaires ».
On ne peut que se
féliciter de l’existence d’une volonté politique et de la mise en place d’un
dispositif de vigilance et de gestion des crises.
Cependant, cette réunion
n’était pas inclusive. En effet, à la lecture du communiqué, des acteurs
clé, n’étaient pas présents. En l’occurrence les représentants des services de
santé, de l’Office National de l’Electricité et de l’Eau Potable (ONEE), de la
protection civile et des Forces Auxiliaires.
L’importance de
ces services n’est pas à démontrer. En effet, en cas d’arrivée de plusieurs
malades atteints par Ebola, c’est les services de santé qui seront en première
ligne et quel que soit la menace, la protection civile est toujours mise à
contribution. S’il y a une coupure volontaire ou involontaire des réseaux
d’alimentation en électricité et en eau d’un aéroport, L’ONEE est en mesure de
rétablir le fonctionnement normal de ces réseaux, assurant les activités de
l’aéroport et des organismes de sécurité. Le renseignement local et le maintien
d’ordre fournis par les Forces Auxiliaires sont très utiles en cas de crise.
Une attaque de nature terroriste ou autre, induit la gestion d’une
palanquée d’intervenants. En outre avoir une réaction adaptée à la situation et
mieux cerner la menace, demande de :
- Concevoir en amont, des modes d’action rapides et précis ;
- Avoir un commandement centralisé et une exécution décentralisée ;
- Inclure et coordonner toutes les capacités disponibles de l’état et du secteur privé ;
- Raccourcir la chaine décisionnelle ;
- Instaurer des systèmes d’alerte et de contrôle ;
- Disposer de moyens humains et matériels adéquats ;
- Communiquer avant, pendant et après l’évènement ;
- Penser que la menace peut être conventionnelle, biologique, nucléaire, chimique ou cybernétique ;
- Appliquer les lois la guerre : unicité du commandement, concentration de l’effort et économie des moyens
- Définir des règles d’engagements de tous les intervenants.
Se prémunir d’une
menace terroriste par les principes de défense aérienne, est un concept novateur
ayant fait ses preuves lors des récentes guerres. Il contrera surement avec
efficacité souhaitée la fugacité, la puissance de feu, la souplesse d’emploi, la
rapidité d’exécution et la Maîtrise de l’information et du milieu des
agresseurs.
En outre, les vulnérabilités
de notre pays faces aux dérives sectaires, trouvent leurs fondements dans les
agissements de nos politiciens, journalistes, entrepreneurs, intellectuels,
syndicalistes, démons, crocodiles… qui ergotent à longueur de journée pour des
problèmes de formes et créent des polémiques inutiles, par peur du changement.
Un changement qui ébranle leur existence dans un milieu leur procurant un
maximum de profits.
Compte tenu de l’environnement actuel, la
raison veut et surtout l’intérêt du pays exige de nous tous, de renforcer notre
front intérieur pour faire face aux défis auxquels le Maroc est confronté. Des menaces
politiques, économiques, médiatiques, idéologiques, environnementales et
surtout sécuritaires nous guettent. À nous d’avoir une vision plus large sur
notre environnement géopolitique, d’avoir la sagesse de transcender
pacifiquement les résistances aux changements qui obèrent notre développement
et de consolider la stabilité de notre pays autour de notre identité nationale,
autrement, même les crocodiles n’auront plus rien à se mettre sous leurs crocs.
« Ceux
qui rendent les révolutions pacifiques impossibles rendent les révolutions
violentes inévitables[ix] ».
John Kennedy
[i] John A. Warden III, Air
theory for the twenty-first century, p. 317
[ii] LeDroit, journal canadien du
23/10/14
[iii] Le Petit Prince de Antoine de
Saint-Exupéry chapitre XII
[iv] Citations de Gustave Flaubert Madame
Bovary (1857), III, 4
[v] Extrait du préambule de la Constitution du Maroc de 2011
[vii] LeFigaro.fr avec AFP du 27/10/2014 à
12 :09
[viii] L'art de la guerre Sun Tzu
[ix] JFK, 13 mars 1962, Maison Blanche, en s’adressant à ”the first
Anniversary of the Alliance for Progress”.