vendredi 6 septembre 2013

DE LA STRATÉGIE A LA DOCTRINE UNE LITTÉRATURE MILITAIRE PROFUSE ET ABSCONSE


DE LA STRATÉGIE A LA DOCTRINE


« Un plan de campagne doit avoir prévu tout ce que l’ennemi peut faire, et contenir en lui-même les moyens de le déjouer. Les plan de campagne se modifient à l’infini, selon les circonstances, le génie du chef, la nature des troupes et la topographie ».
Napoléon [1]

Politique (policy), géopolitique, géostratégie, stratégie, concept, doctrine, mode d’action et tactique sont des expressions le plus souvent galvaudées et utilisés non seulement par les militaires mais aussi par les civils. La politique d’une entreprise, la géostratégie des médias, le management stratégique, la tactique de l’équipe nationale de football, etc. sont bien des exemples d’utilisation tous azimuts de ces termes.
A force d’utiliser ces termes tout au long de ma carrière militaire je me suis rendu compte de la confusion qui existe dans mon esprit quant à la signification de chacun de ces mots par rapport à la stratégie et à la doctrine, et je suis arrivé à la conclusion résumée par Socrate «je sais que je ne sais rien ». A cette confusion d’essence intellectuelle, s’est ajoutée dans ce domaine, par le biais des technologies de communication, la profusion de théories et de certitudes civiles et militaires.
Afin de compléter mes connaissances en la matière et surtout m’éviter toute formulation plutôt absconse et enlever de mon esprit toute ambigüité qui peut altérer le sens de chaque mot, je me suis lancé dans une recherche critique, fondée essentiellement sur le questionnement loin de toute idée préconçue ou tout dogmatisme, sur les fondements de chaque vocable et ses corrélations avec les autres mots.
Cette recherche a abouti au fait que la stratégie n’est ni moins ni plus qu’une idée traduite en action par des plans dans un environnement donné et en fonction des ressources du moment et futurs et que  tous les termes évoqués, plus haut, ne sont que stratégie ou bien ils entrent dans l’une de ses composantes.  La confusion est plutôt liée à la non-prise en compte, dans toutes les explications, des niveaux de conception et de décision.
Le présent article tentera de développer cette idée centrale, sans pour autant prétendre apporter toutes les réponses, mais par contre, il permettra d’éclairer d’une manière appréciable toutes ses notions, aidant par-là tous ceux qui comme moi étaient dans la confusion. En livrant d’abord les définitions des termes en question comme base de réflexion ; Ensuite en tirant de ces définitions les fondements de la stratégie en général ; Enfin en essayant de mettre en exergue les sources de confusion, la répartition et la composition de la stratégie et de la doctrine dans le domaine militaire.

1. Définitions

Dans le but de mieux comprendre la stratégie, il est utile de passer en revue un certain nombre de définition, jugées importantes. Ces définitions sont de différentes sources et de différents horizons.
Politique :
La politique [2] : nom féminin : science ou art de conduire les affaires publiques, de gouverner un État. Du grec politikos, «qui concerne la cité» (de polis, «cité»).
« La politique est l’organisation méthodique, théorique et éventuellement pratique des actions d’un gouvernement au pouvoir sur des bases conceptuelles définies et finalisées en vue de maintenir l’équilibre social nécessaire au développement optimal et à la cohérence  d’un ensemble territorial et de sa population, ainsi qu’à l’évolution de leurs rapports avec d’autres ensembles gouvernés. »
Pour Aristote [3], l'homme est par nature un «animal politique», c'est-à-dire un animal destiné à vivre avec ses semblables au sein d'une cité organisée, et la politique est elle-même la «science souveraine» dont dépendent toutes les autres sciences.
Et d’après le Général Jean Salvan [4] : la politique est : « le dessein que l'on veut réaliser (projet de société, idéologie), la lutte pour parvenir au pouvoir (national, impérial ou mondial) et s'y maintenir, c'est-à-dire " l'art de gouverner " et la projection de la puissance, et, enfin, la désignation des " amis " et des " ennemis " ».
Géopolitique :
Aymeric CHAUPRADE [5] définit la géopolitique comme étant « l'étude de la volonté de puissance appliquée aux situations de la géographie physique et humaine ».
Elle permet donc de comprendre les intentions et comportements des responsables internationaux mais aussi des peuples, les relations entre États et plus généralement de percevoir les enjeux des relations internationales.
La géopolitique emprunte ses données à la fois à l'histoire et à la géographie. Elle est l’une des disciplines qui concourent à l'analyse des faits internationaux.
D’après André-Louis SANGUIN [6], on peut distinguer deux géopolitiques : la géopolitique des militaires et la géopolitique des civils. La géopolitique des militaires s’attache au destin d’un pays. La géopolitique des civils repose davantage sur une vision de politique internationale dans laquelle on injecte beaucoup d’ingrédients spatiaux…la géopolitique est «un corpus de textes, d’articles, de discours injonctifs qui présentent une situation et indiquent (implicitement ou explicitement) une politique à suivre».
Pour Alain LITZELLMANN [7] : « Il existe de nombreuses définitions de la géopolitique, trahissant des approches parfois fort différentes » et il pose comme définition : « la géopolitique est l’étude des déterminants géographiques qui interviennent dans la politique des États, tant intérieure qu’extérieure. Ces déterminants relèvent de toutes les branches de la géographie. » Il avance aussi que : « de la géopolitique, des idées et des volontés, découle la politique. La politique se poursuit, en cas d’affrontement armé, dans la stratégie ».
Géostratégie :
Fille de la géopolitique, la géostratégie se définit comme étude des conflits à l’échelle macro-géographiques.
La géostratégie [8] est aussi l’étude, la préparation ou l’exécution d’opérations militaires à l’échelle macro-géographique, c’est-à-dire à une dimension spatiale suffisante pour exclure la constitution d’un théâtre unique…La guerre étant la continuation de la politique par d’autres moyens, la géostratégie constitue naturellement une province de la géopolitique.
La définition de la géostratégie pour André-Louis SANGUIN [9] se lit comme suit : "La géostratégie est une méthode de l’action politique dans l’espace. La géostratégie théorique est le discours de cette méthode". … La géostratégie est la mise en œuvre d’instruments opérationnels au service d’un grand dessein de politique internationale ou de politique militaire… "La géostratégie est une méthode de l’action politique dans l’espace. La géostratégie théorique est le discours de cette méthode.
Stratégie :
La définition classique de la stratégie donnée par plusieurs penseurs (Clausewitz, Raymond Aron...) est : « L'art d'employer les forces militaires pour atteindre les résultats fixes par la politique ».
Elle n'est pas la seule définition formu­lée par les chercheurs, il y en a d’autres :
Liddell hart [10] : la grande stratégie : « pratiquement synonyme de la politique qui guide la conduite de la guerre, mais distincte de la politique plus fondamentale qui doit déterminer son objet, l’expression – grande stratégie- sert à exprimer l’idée de – politique en cours d’exécution-. Le rôle de la grande stratégie consiste en effet à coordonner et diriger toutes les ressources de la nation ou d’une coalition afin d’atteindre l’objet politique de la guerre, but défini par la politique fondamentale».
Anne MARCHAIS-ROUBELAT [11] trouve même que la stratégie militaire et stratégie d'entreprise est le même combat. La stratégie militaire sert de référent à la stratégie d’entreprise.
Pour Herbert ROSINSKI [12], la stratégie est devenue non seulement la tâche de « conduite et direction de la guerre dans son ensemble », mais elle inclut aussi l'effort que doit faire tout chef militaire pour endurer et surmonter cet exceptionnel état de tension prolongée.
Le Général BEAUFRE [13] définissait la stratégie comme étant «l’art de la dialectique des volontés employant la force pour résoudre leur conflit ».
Loup Francart [14] affirme que la stratégie est : « l’art de coordonner l’ensemble des forces de la nation pour assurer à celle-ci la place et le rôle définis par le projet politique du gouvernement... Elle met l’accent sur la capacité à concevoir, à organiser les idées autour d’un but commun pour faire face à un environnement hostile ». Il ajoute que le Général Poirier définit la stratégie comme la « conception d’une action collective et finalisée en milieu conflictuel».
Les textes règlementaires français [15] font état de deux catégories de stratégie :
« 1°) La stratégie générale intéresse la direction de la guerre. Elle est du ressort des chefs d’états qui, assistés de conseillers de tous ordres, arrêtent les buts de la guerre et répartissent les missions selon la nature des moyens de pression envisagés. C’est ainsi que la stratégie générale a des composantes diplomatiques, économiques, scientifiques, spirituelles et militaires. En temps de paix comme en temps de guerre elle ne cesse d’être active. Elle vise à assurer, à tout moment, les avantages et les moyens indispensables pour atteindre les objectifs politiques aux moindres frais.
2°) La stratégie militaire, elle, intéresse la conduite de la guerre. Elle est du ressort du Haut Commandement, qui traduit les directives de stratégie générale en termes répondant à l’utilisation des forces armées, et assure cette utilisation. »
Selon le dictionnaire d’art et d’histoire militaires [16] «la stratégie est la science (si l’on choisit de mettre l’accent sur le savoir et sur la méthode) ou l’art (si l’on veut privilégier l’expérience) de l’action humaine finalisée volontaire et difficile»
D'après le Petit Larousse [17], la stratégie est « l’art de coordonner l'action de forces militaires, politiques, économiques et morales impliquées dans la conduite d'une guerre ou la préparation de la défense d'une nation ou d'une coalition », ou encore « l'art de coordonner des actions, de manœuvrer habilement pour atteindre un but » . Le Robert préfère la définition plus simple : « art de gouverner les sociétés ».
Le dictionnaire du département à la défense US précise [18] (1997) que la :
Strategy: «est l'art et la science de développer et d'utiliser les forces politiques, économiques, psychologiques et militaires si nécessaire en temps de paix et de guerre, pour obtenir le maximum de soutien aux politiques, afin d'augmenter les probabilités et les conséquences favorables de la victoire et de réduire les chances de défaite ».
Quant à la stratégie militaire nationale, c’est : «L'art et la science de diffuser et appliquer la force militaire pour atteindre l'objectif national en temps de paix et en temps de guerre ».
Ces définitions américaines ont changé [19] en 2013, dans le même document, en :
Stratégie: «Une sage idée ou un ensemble d'idées pour employer les instruments de la puissance nationale d'une manière intégrée et synchronisée pour atteindre les objectifs du théâtre, nationaux, et / ou multinationaux»; et pour la stratégie militaire nationale: «Un document approuvé par le président du Joint Chiefs of Staff sur la répartition et de l'emploi de la force militaire pour atteindre les objectifs de la stratégie de sécurité nationale et de la stratégie nationale de défense ».
Le monde de l’entreprise a aussi sa définition, selon le dictionnaire de stratégie [20] : « La stratégie peut être définie comme l’ensemble des manœuvres qui permettent à l’entreprise de mener victorieusement la conquête concurrentielle de ses marchés. Il s’agit d’un processus de décision et d’action, délibéré et anticipatif. C’est par lui que l’entreprise définit ses priorités, oriente ses forces, alloue – et réalloue – ses ressources rares. C’est par lui aussi qu’elle fixe les buts à atteindre et les normes du succès ou de la victoire».
Alors qu’Edward n. LUTTWAK [21] dit : « A mesure qu’une vision de la stratégie émergeait de mes lectures remâchées, des problèmes étudiés et de mon expérience de terrain, il me parut que je n’avais pas affaire à un ensemble de banalités… Au niveau technique de la stratégie, l’interaction concerne les armements ; au niveau tactique, les unités qui se font face. Au niveau opérationnel, nous avons affaire à l’antagonisme de deux pensées. C’est à ce niveau que les méthodes d’ensemble pour la conduite de la guerre sont mises en œuvre, … C’est au niveau opérationnel que le commandement de l’ensemble des forces impliquées se déploie et, plus encore, c’est à ce niveau que l’on peut appréhender l’affrontement dans sa totalité, avec toutes ses péripéties et ses retournemnts de situation. »
Concept [22] :
Concept : Notion ou énoncé d'une idée exprimant comment quelque chose pourrait être exécuté ou mené à bien et qui peut conduire à une procédure acceptée. 
Concept d'emploi des forces : (Force commitment concept) Énoncé des principes, des conditions et des finalités d'emploi des forces dans un contexte géostratégique donné.       
Concept de l'opération [23] : (Concept of operation (CONOPS)) Expression claire et concise de la façon dont le commandant entend réaliser la mission qu'il a reçue. Couvrant la totalité de la mission, le concept d'opération énonce l'objectif que le chef s'est fixé, et précise, dans ses grandes lignes, le déroulement de l'action, ainsi que la répartition des missions des unités subordonnées.  
 Concept d’opération (ATP-35[24] (§ 205)) : (Concept of operations (CONOPS)) : 
1. Aux niveaux stratégique et opératif, expression des intentions du chef militaire quant à l’utilisation des forces, la chronologie et les lieux pour atteindre ses objectifs, et sur la façon dont il convient de synchroniser les différentes capacités des ressources mises à sa disposition pour y arriver.
2. Au niveau tactique, expression claire et concise de la façon dont le commandant entend réaliser la mission qu’il a reçue. Couvrant la totalité de la mission, il énonce l’objectif que le chef s’est fixé, et précise, dans ses grandes lignes, le déroulement de l’action, ainsi que la répartition des missions des unités subordonnées. Aussi appelé " idée de manœuvre ".
Concept stratégique (AAP 6[25] (V)) : (Strategic concept) Ligne d'action générale adoptée en considération de la situation stratégique. Elle est définie d'une manière suffisamment large pour fournir le cadre des mesures militaires, diplomatiques, économiques, psychologiques et autres qui en découlent.
Doctrine :
Sun Tsu : « La doctrine fait naitre l'unité de pensée ; elle nous inspire une même manière de vivre et de mourir, et nous rend intrépides et inébranlables dans les malheurs et dans la mort».
La pensée stratégique russe actuelle [26] (projet de doctrine militaire russe (mai 1992)) «reprend les concepts et la terminologie de la doctrine militaire soviétique passée. A l’instar de cette dernière, la doctrine militaire russe comporte deux volets, l’un politique et l’autre militari-technique. Parmi les aspects politiques, la "prévention des guerres" et la "préparation permanente pour repousser une agression" en constituent les éléments fondamentaux. Les aspects militari-techniques concernent essentiellement : 1) les caractéristiques possibles de la guerre future ; 2) la nature des missions de la défense ; 3) la structure des forces armées ; 4) la préparation du pays et des forces armées pour la guerre, etc.».
La doctrine militaire selon l’armée canadienne [27] est : « un ensemble de principes, de théories et de politiques reconnus comme valables et fiables, offrant aux forces militaires de bonnes chances de succès quand elle est mise en œuvre pendant des périodes de tension, de crise ou de guerre. La doctrine militaire explique en termes généraux comment les opérations doivent être menées de manière à atteindre des objectifs opérationnels. La doctrine, c'est essentiellement " ce qui est enseigné ". Elle est la somme des connaissances acquises, principalement par l'étude et l'analyse de l'expérience. En soi, la doctrine reflète ce qui fonctionne le mieux ».
Au sein de l'OTAN, la doctrine militaire est définie comme les principes fondamentaux servant aux forces militaires à orienter leurs actions dans la poursuite de leurs objectifs. Elle fait autorité mais elle doit être appliquée avec discernement. La doctrine militaire n'est pas un dogme et elle n'a pas force de loi. Elle représente plutôt l'opinion officielle et collective reconnue sur la meilleure manière d'utiliser des forces militaires au combat et elle évolue avec l'expérience et la pensée. La doctrine militaire vise principalement à guider la pensée des militaires et constitue un cadre permettant de comprendre les opérations militaires. »
L’AAP 6(V) définit la doctrine comme des :   Principes fondamentaux qui guident les forces armées dans la poursuite d'un objectif. Ces principes sont impératifs, mais leur application requiert du jugement.     
Il indique aussi que la doctrine d'emploi des forces (Force commitment doctrine) regroupe les Principes fondamentaux selon lesquels les forces doivent agir et être coordonnées dans les différents types d'opérations pour remplir avec succès les missions qui leur sont confiées.
Mode d’action :
Mode d'action (Course of action) : Séquence d'actes combinant l'emploi des moyens dans le temps et dans l'espace et permettant d'exécuter tout ou partie de la mission.
Tactique :
Clausewitz [28] la présente de la manière suivante : "La tactique est la théorie de l’emploi des forces au combat alors que la stratégie est celle de l’emploi des combats en vue de la décision finale".
Le Robert pour la définition de la tactique, nous indique clairement qu'il s'agit des moyens que l'on emploie pour parvenir à un résultat.
La tactique (OTAN) : Art de combiner, en opération, les actions de tous les moyens militaires pour atteindre les objectifs assignés par la stratégie opérationnelle.
Le Général F. GAMBIEZ et le colonel M. SUIRE [29] affirment : « la tactique est avant tout l’art d’utiliser au mieux les moyens militaires en fonction du milieu et des facilités offertes par la technique, dans le but de réduire l’adversaire par le combat ou la menace du combat ».
En paraphrasant l’Amiral CASTEX, les définitions des termes présentées dans ce chapitre, représentent les éléments d’un spectre solaire. Il y a une zone d’infrarouge, qui est le royaume de la politique, et une zone d’ultraviolet, qui est celle de la tactique. Ils forment ainsi un ensemble, un tout complet, bien uni, et nullement des éléments séparés.
Tout ceci nous amène à penser que ces notions sont étroitement liées. Il serait donc difficile sur le plan strictement cognitif d'établir une distinction claire entre eux, sans se pencher sur leurs fondements, en particulier ceux de la stratégie.

2.  Les fondements de la stratégie

Entre 1997 et 2013, comme il est précisé au chapitre1, la définition de la stratégie par l’armée américaine a changé de « l'art et la science de développer et d'utiliser les forces...(Action)», en «Une sage idée ou un ensemble d'idées...(Pensée)».
Par ailleurs, le stratégiste français Hervé Coutau-Begarie dans le chapitre IV de son livre « traité de stratégie » parle de la pensée et de l'ac­tion. Ce sont, à mon avis, ces deux mots qui permettent de classer, en général, les chercheurs : Les civils et les militaires. Les premiers dans leurs recherches développent plus le volet Pensée de la stratégie, les seconds, compte tenu de leurs faits d'armes, parlent plus de l'action. Ainsi une dichotomie est créée dans l'analyse de la stratégie.
L’Amiral Raoul CASTEX [30] dans son livre Théories stratégiques avait dit :« j’ai plus que quiconque, horreur de ces contestations byzantines de termes, de toute cette discussion pointilleuse qui sent d’une lieue la scolastique stérile du Moyen Âge et le pédantisme des médecins de Molière… Pour moi, la stratégie n’est autre que la conduite générale des opérations, art suprême des chefs d’une certaine élévation hiérarchique et des états-majors destinés à leur servir d’auxiliaires. La stratégie prépare les combats, s’efforce de les amener dans les conditions les meilleures, de leur faire produire les plus grands résultats. Elle les relie les uns aux autres. Elle les domine et elle les coordonne pour les maintenir sur la ligne directrice qu’elle s’est fixée, et qu’elle accommode aux évènements. Elle détient l’inspiration générale suivant laquelle la campagne est menée, et à laquelle elle ramène tout. Elle guide la tactique, lui faisant la place libre dès que son heure est arrivée. »
Clausewitz [31] disait dans son ouvrage «de la guerre » : « La meilleure preuve de génie qu’un prince ou un Général puisse fournir, c’est de savoir organiser la guerre en conformité exacte avec ses moyens et ses buts, sans en faire trop ou pas assez. Mais les efforts de ce génie ne se révèlent pas tant par des formes d’action nouvellement inventées et frappantes, que dans l’heureuse issue finale de l’ensemble…Et comme en stratégie on ne voit pas comme en tactique la moitié des choses de ses propres yeux, qu’il faut au contraire tout deviner et conjecturer, les convictions sont à leur tour moins inébranlables. D’où les hésitations dans lesquelles s’enlisent la plupart des Généraux au moment d’agir ».
Quatre mots dans cette assertion de Clausewitz définissent, à mon avis, les bases conceptuelles de la stratégie : deviner = pensée ; conjecturer = environnement ; convictions = volonté et agir = action.
En effet, la pensée va aboutir à une idée. L’environnement relativisera les ressources, et le temps. La volonté quant à elle affirmera les décisions et fixera   l’objectif, alors que l’action concrétisera l’idée par un plan d’action.
L’analyse de ces quatre mots clé, en se basant sur le livre « De la stratégie – l’expérience militaire au service de l’entreprise », du Général (CR) Gil FIEVET [32] va mettre en exergue les éléments constitutifs des fondements de la stratégie, à savoir : la pensée ; l’environnement ; la volonté ; et l’action.

2.1 Les bases conceptuelles

2.1.1 La pensée

C’est l’idée qui va nous permettre d’atteindre l’objectif. C’est le processus de résolution d'un problème qui se traduit par la définition du problème (pensée) et l'application (l’action) des moyens nécessaires pour triompher des obstacles qui se dressent entre l'objectif et la réalité.Ainsi grâce à l’heuristique (une règle générale d’action, applicable à toute situation, qui permet la plupart du temps d’aboutir plus rapidement à la solution) plusieurs solutions sont envisageables.
Ces solutions ne sont pas le fruit du hasard, elles sont le résultat de l’expérience du passé, de la vision que l’on se fait de l’avenir et de l’environnement.

2.1.2 L’environnement

L’idée trouvée aussi n’est pas isolée dans le temps et dans l’espace. C’est une prédiction tributaire d’un environnement, politique, géopolitique, géostratégique du moment et du futur.

2.1.3 La volonté

Cette volonté se matérialise au sein de la stratégie par la fixation de l’objectif et des moyens tout le long de l’action.
Le choix des solutions à retenir, s’opérera aussi par la volonté de décider d’éliminer des idées non souhaitables. Cette décision ne peut être fortuite mais elle doit être l’aboutissement d’un processus bien défini.

2.1.4 L’action :

C’est la concrétisation de l’idée en l’adaptant aux réalités (ressources et objectif) du moment et de leur projection dans le futur.
Donc la stratégie, c’est une idée qui se basant sur des ressources, va nous permettre d’atteindre notre objectif dans un environnement donné.
Si les fondements de la stratégie sont maintenant connus, il parait nécessaire de voir les liens qui existent entre la stratégie et les autres termes qu’on a définis auparavant.

2.2. Les interactions

La stratégie, partant d’une réalité donnée, c’est l’idée qui permet d’atteindre l’objectif. Etant du domaine de l'esprit, la stratégie ne connait pratiquement pas de limites. Ainsi il y a une infinité de chemins pour atteindre l’objectif.
C’est aussi la volonté de définir (pensée) et d'appliquer (l’action), dans un environnement donné, une idée pour triompher des obstacles qui se dressent entre l'objectif et la réalité.
C’est le pouvoir de décision qui permet, en fonction des moyens et de l’environnement, de fixer l’objectif et de trancher pour telle ou telle idée, concept, mode d’action, ou stratégie à retenir.
La politique, la géopolitique et la géostratégie font partie intégrante de la stratégie car ils sont les moyens qui permettent d’analyser et de comprendre l’environnement dans le présent et dans le futur et partant sont d’une importance capitale dans le choix de telle ou telle stratégie. L’idée qui est à l’origine de la stratégie n’est pas le fruit du hasard, elle est le résultat de l’expérience du passé et de la vision que l’on se fait de l’avenir.
Si l’étude de l’environnement permet d’avoir une vision, l’expérience du passé quant à elle, c’est là où le concepteur comme disait le Général DE GAULE [33] «puisera ce gout du concret, ce don de la mesure, ce sens des réalités qui éclairent l’audace, inspirent la manœuvre et fécondent l’action. ».
Ce réalisme se matérialise au sein de la stratégie à travers la doctrine.
En effet, parmi les possibilités pour atteindre l’objectif, il y a des solutions qui ont été essayées par le passé avec plus au moins de bonheur. C’est ce qui a marché le mieux aux yeux d’une organisation, qui est choisi par elle comme doctrine. Pourquoi vouloir réinventer la roue ? Analyser l’expérience du passé pour s’aider à penser et à agir avec discernement, sans toutefois brider la réflexion et l’esprit d’initiative, c’est la quintessence même.
La doctrine est la référence, elle constitue l'assise ou le point de départ, du raisonnement et de l’action. Elle est le résultat de l'étude et de l'analyse de l'expérience, de l’expérience du passé et de la vision que l’on se fait de l’avenir.
C’est une stratégie qui a fait ses preuves, utilisée comme moyen pour :
- ne pas privilégier le court terme ;
- ne pas changer de but ;
- éviter l'indécision.
Les mécomptes que l’on peut éprouver à vouloir saisir d’un coup le sens de la stratégie sont fréquemment dus à des impédimenta qui alourdissent ce concept. Autant les fondements et les interactions de la stratégie permettent d’éclairer le lecteur sur les notions évoquées dans cet article, autant des sources de confusion demandent à être précisées.

3.  Les sources de confusion

L’analyse critique de la stratégie, du concept, du mode d’action, de la doctrine et de la tactique montre que tous ces vocables essayent de répondre tous, à des nuances près, à la question «comment ?».
Pour s’en convaincre, regardons les définitions de l’OTAN en la matière.
Concept :   Notion ou énoncé d'une idée exprimant comment quelque chose pourrait être exécuté ou mené à bien et qui peut conduire à une procédure acceptée.
Mode d’action : Séquence d'actes combinant l'emploi des moyens dans le temps et dans l'espace et permettant d'exécuter tout ou partie de la mission.
Doctrine :   Principes fondamentaux qui guident les forces armées dans la poursuite d'un objectif. Ces principes sont impératifs, mais leur application requiert du jugement.
Tactique : Art de combiner, en opération, les actions de tous les moyens militaires pour atteindre les objectifs assignés par la stratégie opérationnelle.
Le plus surprenant aussi c’est la définition de la manœuvre : Combinaison d'actions planifiées, dans l'espace et dans le temps, menées dans un domaine particulier, et contribuant à atteindre l'objectif fixé dans le cadre de la mission (ex : manœuvre médiatique, manœuvre logistique, etc.).
De cette présentation apparaissent les origines de la confusion qui s’opèrent dans les esprits. En effet, tous ces mots font référence à plusieurs éléments : des ressources ; une idée ; la traduction de cette idée en actes ; et atteindre un objectif dans un environnement donné.
Les confusions sont dues, à mon sens, au fait que chaque mot dans sa mise en œuvre met l’accent sur l’une ou l’autre des composantes de base de la stratégie. Et ainsi chaque vocable est identifié à la composante dominante.
Cette identification ne crée pas, à mon avis, à elle seule la confusion dans les esprits.
En effet, les militaires, s’agissant de la définition de la stratégie sont plus loquaces sur volet action de la stratégie et s’orientent plus sur les outils de l’heuristique. Ces outils comme les définissent les USA sont l’Operational Art [34] «C'est l'utilisation d'une pensée créatrice par le commandant pour concevoir des stratégies, des campagnes, et des opérations d'envergure et organiser et utiliser la force militaire - is the use of creative thinking by commanders and staffs to design stratégies, campaigns, and major organise and employ military force».
La confirmation de la confusion dans les esprits des militaires est manifeste dans la définition de l’art opérationnel par l'armée canadienne [35] « emploi de force visant à atteindre des objectifs stratégiques et opérationnels grâce à la conception, l’organisation et la conduite de stratégies, de campagnes, d’opérations de grande envergure et de batailles
Certes, cette confusion entre l’action et les outils de créativité est importante aussi, mais situer les différents niveaux de la stratégie l’est encore plus.
D'ailleurs Edward N. LUTIWAK dans son ouvrage «Le paradoxe de la stratégie [36] » disait : « A mesure qu’une vision de la stratégie émergeait de mes lectures remâchées, des problèmes étudiés et de mon expérience de terrain, il me parut que je n'avais pas affaire à un ensemble de banalités ... Au niveau technique de la stratégie, L’interaction concerne les armements ; au niveau tactique, les unités qui se font face. Au niveau opérationnel, nous avons affaire à L’antagonisme de deux pensées. C'est à ce niveau que les méthodes d'en­semble pour la conduite de la guerre sont mises en œuvre, ... C'est au niveau opérationnel que le commandement de l'ensemble des forces impliquées se déploie et, plus encore, c’est à ce niveau que l'on peut appré­hender l'affrontement dans sa totalisé, avec toutes ses péripéties et ses retournements de situation ». 
La compréhension des nuances de la stratégie ne peut être manifeste qu’à travers la prise en compte des niveaux de conception et de décision. Du général au particulier, la définition de la stratégie se précise pour donner à l’échelon subalterne le sens du «comment » atteindre l’objectif.
Ainsi Edward Luttwak [37] avait réparti la décision en cinq niveaux : technique, tactique, opératif, stratégique et de grande stratégie.
À mon sens, il n’y a que trois niveaux de décision qui donnent lieu à cinq niveaux de conception : Politique, Politico-militaire, Militaire, Opératif, Tactique. Et à chaque niveau de conception correspond une définition de la stratégie.
 Ces niveaux sont résumés dans le tableau ci-après pour le domaine militaire, mais en remplaçant le mot militaire par économique, financier, industriel, culturel etc. on peut retrouver tous les autres domaines de la stratégie nationale :
Niveau de décision
Niveau de conception
Stratégie
Stratégique
Politique
Grande stratégie ou stratégie globale ou stratégie nationale 
Politico-militaire   
Stratégie générale militaire 
Militaire
Stratégie opérationnelle ou génétique du niveau stratégique 
Opératif
Opératif
Stratégie opérationnelle ou génétique du niveau opératif
Tactique
Tactique
Stratégie opérationnelle ou génétique du niveau tactique

En effet, ces niveaux nous éclairent sur la stratégie et la doctrine et on comprend encore mieux en connaissant leurs répartitions et leurs compositions.

4.  Répartition et composition de la stratégie et de la doctrine

4.1 Répartition

4.1.1 Stratégie

L’Amiral CASTEX [38] affirmait que «les frontières de la stratégie n’ont, bien entendu, rien d’aussi nettement tranché que la théorie pourrait le faire croire... D’un côté, la stratégie confine à la politique… Elle a avec elle des liens intimes, enchevêtrés ; elle plonge en elle des racines profondes ; telles opérations ont de si nombreux côtés moitié stratégiques moitié politiques qu’elles créent entre ces deux modes d’activités une région neutre qui participe à la fois de l’un et de l’autre, et dans laquelle il est impossible de les départager. Il y a entre eux interprétation constante». D’où en fonction du niveau de conception des nuances apparaissent, car les intérêts de chaque niveau de décision sont différents, quoiqu’ils œuvrent tous pour la réalisation du même projet politique.
En effet, ce dernier fixe les desseins nationaux suprêmes et détermine le rôle et la place qu’on veut donner au pays dans le concert des nations.
Apres la définition de son projet politique, tout gouvernement déclare périodiquement la manière par laquelle il envisage de le réaliser : c’est la stratégie nationale.
À partir des orientations de la stratégie nationale, est développée une option stratégique par domaine : militaire, économique, diplomatique, culturel, etc.
Pour le volet défense, cette option est la manière générale d'envisager l'emploi des forces militaires dans le cadre de la stratégie nationale.
L'option stratégique propose un ensemble de voies, moyens et modalités pour atteindre les objectifs politiques. Elle s'exprime par la définition du cadre d’intervention et de la mission confiée aux forces armées, en vue de contribuer à la réalisation des différents aspects de l'état final recherché (EFR) politique. Cette option stratégique est à la base de la stratégie générale militaire. Cette stratégie exprime la politique de défense, et régit la conception, la mise sur pied, l'organisation et la mise en œuvre des moyens militaires, dans le cadre de la stratégie nationale. Ce niveau s'intéresse à la préparation et aux opérations militaires.
C’est le niveau auquel est organisée la contribution des armées à la stratégie nationale mise en œuvre par le gouvernement.
La stratégie opérationnelle, découlant de la stratégie générale militaire, définit les principes et les modalités d'emploi des forces.
La stratégie opérationnelle est mise en œuvre les forces, en cas de nécessité. Elle développe dès le temps de paix les hypothèses d’engagement et les modes d’actions envisagés pour atteindre l’objectif politique.
Le niveau de stratégie opérationnelle est le niveau auquel est planifié, conduit et soutenu un engagement en vue d’atteindre la situation l’EFR militaire.
Cet engagement peut se situer à trois niveaux, stratégique, opératif et tactique.
Si la stratégie opérationnelle s’occupe de la conception et de l’exécution de la manœuvre aux niveaux stratégique, opératif et tactique, en parallèle, la stratégie génétique (non traitée dans cet article) s’intéresse aux moyens de mise en œuvre de la force. Même s’il y a une primauté de l’idée sur le matériel, la stratégie génétique a une capacité d’influence sur toutes les sphères de la stratégie, car elle permet d’accorder les buts recherchés aux

4.1.2 Doctrine

La doctrine elle aussi à l’instar de la stratégie dépend du niveau de conception et de décision :
Niveau de décision
Niveau de conception
Doctrine
Stratégique
Politique
Doctrine nationale (Constitution, Lois…). 
Politico-militaire   
Doctrine militaire (interarmées).
Militaire
Doctrine fondamentale (par composantes).
Opératif
Opératif
Doctrine opérationnelle (par fonctions).
Tactique
Tactique
Doctrine tactique (par systèmes d’armes).

La doctrine nationale englobe les choix officiels sur le meilleur moyen d'employer les forces nationales pour réaliser le projet de société.
La doctrine militaire rassemble les choix officiels sur le meilleur moyen d'employer les forces armées (interarmées).
La doctrine fondamentale définit les directives générales sur l’organisation et l’emploi des composantes des forces armées.
La doctrine opérationnelle fournit plus de détails sur l’organisation et les principes d’emploi des composantes par fonction tenant compte des objectifs et de l’envirnt.
La doctrine tactique décrit l’emploi des systèmes d’armes en fonction des objectifs et des conditions tactiques (menace, météo, et le terrain).                  
Si les nuances commencent à paraitre plus clairement, il s’avère légitime de voir la composition de la stratégie et de la doctrine à chaque niveau de conception.

4.2 Composition

4.2.1 La composition des différentes stratégies


Composition 
Résultat 
Stratégie nationale 
- Un concept stratégique : Ligne d'action générale adoptée en considération de la situation stratégique. Elle est définie d'une manière suffisamment large pour fournir le cadre des mesures militaires, diplomatiques, économiques et autres qui en découlent ;
- Un Objectif politique/ EFR politique.
Projet de société.
Stratégie générale militaire 
- Concept d’emploi : Énonce des principes, des conditions et des finalités d'emploi des forces dans un contexte géostratégique donné. (Politique de défense, cadre d’emploi, mission) ;
- Organisation ;
- Moyens ;
- Objectif militaire / EFR militaire.
Objectif politique/ EFR politique
Stratégie opérationnelle niveau 
Stratégique.
- Concept d’opération : expression des intentions du chef militaire quant à l’utilisation des forces, la chronologie et les lieux pour atteindre ses objectifs, et sur la façon dont il convient de synchroniser les différentes capacités des ressources mises à sa disposition pour y arriver.
 - Plans/ordres de la campagne ;
- Centre de gravité stratégique.
Objectif militaire/ EFR militaire
Stratégie opérationnelle niveau Opératif.
- Concept d’opération : idem niveau stratégique ;
- Plans/ordres de l’opération ;
- Centre de gravité opératif.
Centre de gravité stratégique
Stratégie opérationnelle niveau tactique.
Concept d’opération : expression claire et concise de la façon dont le commandant entend réaliser la mission qu’il a reçue. Couvrant la totalité de la mission, il énonce l’objectif que le chef s’est fixé, et précise, dans ses grandes lignes, le déroulement de l’action, ainsi que la répartition des missions des unités subordonnées.
- Plans/ordres de l’engagement tactique ;
- Objectifs tactiques.
Centre de gravité opératif

4.2.2 La composition des différentes doctrines

           
Composition 
Résultat 
Doctrine
nationale 
Elle définit les capacités, les contraintes, les limites et les objectifs généraux en fonction des facteurs de puissance du pays.
Objectif politique
Doctrine
militaire 
Traduit le concept d’emploi en aptitudes majeures à détenir et définit les principes de guerre.
Elle décrit la meilleure manière d'intégrer et d'employer toutes les composantes dans des opérations conjointes.
Objectif militaire
Doctrine
 fondamentale
Il s'agit des principes fondamentaux et des théories régissant l'utilisation adéquate des ressources de la composante dans des opérations. Elle indique, de manière générale et constante, comment les forces peuvent être idéalement constituées, maintenues et utilisées.
Un exemple de la composante air : description des opérations aériennes.
Centre
De gravité stratégique
Doctrine 
opérationnelle
Elle traite des procédures de toutes les fonctions nécessaires à l’emploi pour atteindre des objectifs dans un milieu opérationnel particulier. Le perfectionnement du matériel et le changement du milieu opérationnel général font que les procédures opérationnelles doivent évoluer pour permettre une utilisation optimale des moyens.
Un exemple de la composante air : la fonction chasse.
Centre de gravité opératif
Doctrine tactique
Elle décrit en détail la façon d'utiliser les systèmes d’armes et les forces devant être employées pour atteindre les objectifs des missions.
Un exemple de la composante air : en Dans ce cas missions offensives des aéronefs de chasse, les procédures de la doctrine tactique détermineront le nombre d'aéronefs devant être employés, le type de formations de vol, les missions d'appui nécessaires et la manière d'attaquer la cible et d'autres facteurs.
Centre de gravité tactique

L'analyse objet de cet article même brève, a montré que la stratégie repose sur l'interaction de quatre compo­santes : la pensée, l'environnement, la volonté et l'action.

En outre, il a été précisé que la composante « environnement » de la stratégie, intègre les données de la politique, de la géopolitique et de la géostratégie, afin de rendre l’action conforme aux réalités sur le terrain. S'agissant du concept et du mode d'action, ils représentent respective­ment l'idée et l'action à entreprendre pour atteindre l'objectif assigné. De plus, en tenant compte des niveaux de conception et de décision, ils peuvent être identifiés à la stratégie, tout court.
La stratégie est devenue un terme très vulgarisé et utilisé actuellement à tort et à travers. A tel point que l'adjectif « stratégique » a supplanté le mot « important »» dans tous les écrits et toutes les conversations. Au contraire de la doctrine qui fait peur car, elle est cristallisée par certaines idées d'endoctrinement, notions péjoratives ayant eu par le passé des conséquences graves sur l'humanité. Alors qu'elle est, sans pour autant être un dogme, la référence et la base du raisonnement et de l'action.
Les définitions abordées ont pu tracer les contours de la stratégie et de la doctrine et mettre en exergue le fait que la distinction entre toutes les nuances ne peut à elle seule dissiper clairement toutes les confusions sémantiques et conceptuelles. La prise en compte des niveaux de conception et de décision est un élé­ment fondamental dans la compréhension de toutes ces notions. Les confu­sions sont aussi le résultat des échanges qui ont lieu entre les pen­sées militaires et les pensées civiles. L'introduction relativement récente de l'art militaire dans l'univers de l'entreprise et l'importation par certains théoriciens militaires, sans aucune précaution, de nouvelles bases conceptuelles et méthodologiques appartenant au monde civil, créent encore plus de confusion dans les
Cet écrit a tenté de traiter d'un sujet vaste et peu consensuel pour partici­per à clarifier des notions fondamen­tales dans l'emploi des forces armées. Le corpus politico-militaire qui en découle est édité par les nations évoluées pour affirmer les convictions et assoir les principes qui régissent leurs pays. L'opportunité de créer ces documents est' d'actualité pour les autres nations. Dans cette optique la question qui se pose est de savoir : faut-il se lancer dans ce chantier de littérature, comme le préconise ci-après, pour Ie cas, Loup FRANCART' [39] :
« Le fait de disposer d'une doctrine est un facteur de rayonnement cer­tain sur les pays constituant nos zones d'influence stratégique. Depuis une dizaine d'années, les armées américaines diffusent leur doctrine dans le monde, organisent des ren­contres, conférences, symposiums pour la faire connaitre.., Le plus souvent d'accès non réservé, cette littérature imprègne les esprits des autres nations, influence leur vision des affrontements futurs et ajoute à la supériorité matérielle une suprématie conceptuelle» .
       Article réactualisé de la version déjà publiée en 2006
                                                      Mustapha DAFIR, Colonel en retraite

[1] Maxims of War, 1831, US Joint Publication 5-0
[2] http://dictionary.reference.com/browse/policy?s=t
[3] Cyberphilo.com
[4] De la stratégie à la géopolitique, quelques éléments d'une approche pluridisciplinaire.  Alexandre Del Valle
[5] Méthodes de la géopolitique, ellipses, 1996.
[6] www.institut-strategie.fr
[7] http://alain.litzellmann.free.fr/introduction.htm
[8]http://www.institut-strategie.fr/strat_058_Motte_tdm.html
[9] http://www.institut-strategie.fr/strat_055_Sanguin.html
[10] Liddell Hart, B. H.StrategyLondon:Faber, 1967 (2nd rev ed.) p. 321 Introduction et traduction de l’anglais par Lucien Poirier PERRIN
[11] http://www.institut-strategie.fr/strat_060_ROUBELAT.html
[12]www.institut-strategie.fr/strat_062_rosinskiev.html Cahiers herbert Rosinski  -L'ÉVOLUTION DE LA STRATÉGIE-
[13] André Beaufre : Introduction à la stratégie.
[14] L’évolution des niveaux stratégique, opératif et tactique. Loup Francart
[15] L’épée de Damoclès, Paris. Plon. 1967 Le Général F. GAMBIEZ et colonel M. SUIRE
[16] Le dictionnaire d’art et d’histoire militaires, André CORVISIER.PUF
[17] De la stratégie à la géopolitique, quelques éléments d'une approche pluridisciplinaire.  Alexandre Del Valle.
[18] JP 1-02 DoD Dictionary of Military and Associated Terms, Joint doctrine encyclodedia,  july 16, 1997
[19] JP 1-02 DoD Dictionary of Military and Associated Terms, Nov 8, 2010 as amended through Mar 15, 2013
[20] Dictionnaire de stratégie, Thierry de Montbrial et Jean Klein.
[21] Le grand livre de la stratégie, Odile Jacob 2002
[22] AAP6 (V) Septembre 1998
[23] ATP-35 (§ 205)
[24] Document OTAN 
[25] Ibid   
[26] Georges TAN ENG BOK. www.strategic .org
[27] SURGIR DU SOLEIL La doctrine aérospatiale des Forces canadiennes (B-GA-400-000/AF-000)
[28] Vom Kriege, II, 1
[29] L’épée de Damoclès Paris. Plon. 1967
[30] Théories stratégiques. Tome I, Paris. Société d’éditions géographiques, maritimes et coloniales.1933.
[31] De la guerre Paris, Editions de Minuit 1955 p182
[32] Paris : Inter Editions, ©1993
[33] Le fil de l’épée Paris. Berger-Levrault. 1932.
[34] Joint Publication 3-0, 11 August 2011
[35] http://www.cfd-cdf.forces.gc.ca/sites/page-eng.asp?page=10834
[36] Odile Jacob (1 avril 1989
[37] Strategy: The Logic of War and Peace, Belknap Press, Cambridge, Massachusetts, 1987 pp 69-71.
[38] Amiral Raoul CASTEX Théories stratégiques. Tome I Paris. Société d’éditions géographiques maritimes et coloniales.1933.
[39] - Loup FRANCART, « PENSER L'ACTION POUR MIEUX AGIR I), DEFENSE NATIONALE, AVRIL 1997

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